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Le Jardin des Especes

by Héliodrome

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1.
À chaque jour je la croise pour la première fois, Celle qui dévore mes fantasmes comme les restes interdits du roi. / Accroché à une mangeoire exposée au gré du vent, / Je m’offre comme totem d’un soir taillé sur l’arbre de ses amants. / Au même moment où je l’investis de ma pensée je reçois / L’identité secrète qui me permet de m’élever parmi les oies / Qui à chaque saison sauvage migrent le long de corridors étroits / Jusqu’aux bancs d’école où le rêve d’unir leur corps échoit. / Sur la berge, les carcasses d’oiseaux se mêlent à celles des humains / Qui se sont jetés du haut de l’escalier dressé comme phare alexandrin. / Leur sexe découvert est offert brûlant à la vue de tous / Pour leur rappeler que l’instinct ne peut pas nous sauver du gouffre. Messager du monde invisible silencieux la nuit, / Mon discours est sans paroles, sans langues et sans bruits. / Entends-le sans oreilles et comprends-le sans ton esprit. Un murmure s’élève comme une rumeur dans la volière des charognards ; / On accuse mes pairs d’être des tueurs sous leur armure de miroir. / Pourtant ils se nourrissent du silence des sépultures à ciel ouvert / Où pourrissent les corps morts couverts de honte et de vers. / Quand j’ai pris mon envol, j’ai retenu dans mes serres des lambeaux de chair, / Arrachés au col des statues de sel sur lesquelles mon bec s’acère. / Perdus de vue par l’adulte, errent au sol les enfants qui se trompent de mère / Et trient parmi les cris le reflet de celui qui pourrait les faire taire. / Amaigris ils ont appris à survivre sur terre dans un espace restreint / Et se sont construit un nid de disques et de livres qui les libère de la faim. / Les ailes déployées dans leur cage ils ont été floués par l’appeau, / Par le chant du chasseur au plumage camouflé sous sa peau. Les roulements de tambour sonnent la marche forcée des oiseaux / Dans la parade des oriflammes aux couleurs vives de leur libido. / Rouge, Iblis la nuit dernière m’a encore troué les lèvres de ses mots / Et m’a convaincu de signer la trêve pour mettre fin au massacre des oripeaux. / Sauf qu’à mon réveil j’avais dans la bouche un goût âcre de charbon et de fer / Et pris les taches de sang sur l’oreiller comme une déclaration de guerre. / C’est pourquoi j’ai levé une armée en même temps que le soleil / Et couru sur la ligne d’horizon jusqu’à ce que mes pieds deviennent vermeils. / Le coq sur les armes de mon blason sonne l’alarme d’une crise existentielle ; / Ma cote sera les femmes qui périront dans les flammes de mon sommeil. / Et quand le phénix renaîtra dans les cendres tièdes de ces matins consumés, / Il saura que les passages des eaux du Styx finissent par tout faire oublier.
2.
Il s’est lancé dans le recel des doctrines orientales / Où il est devenu l’infidèle reclus qui a vendu en ligne l’animal / Pour transgresser les règles du marché interdit / Auquel le désir de solitude a mis une tête à son prix. / Le combat pour faire grandir sans eau l’embryon de son âme / N’a fait que lui fournir trop tôt l’embarras des armes / Mais sa bouche comme ses bras blessent quand ils embrassent l’ivresse / De posséder les mots et les voix qui dictent le choix de ses gestes. / Il ne sait plus où il a perdu le regard de l’Autre / Peut-être volé par cette gitane dont il a déjà été l’hôte / Et qui lui a laissé à conserver des miettes de souvenirs fauves / Qui guettent le moment propice pour sortir se nourrir d’aumônes. / Dès que les sacrifiées entrent dans l’arène où ses pensées rôdent / Elles se limitent désormais à leur seul statut de choses / L’instinct a tôt fait de lacérer les corps marqués par la faute. / Pour enfin se délecter du festin bridé au fond de leurs yeux jaunes. Pour purger le mal il a choisi de s’exiler sur une montagne / Et d’invoquer le vide en lisant des magazines de femmes. / Il a scellé le sacré de l’offrande dans du papier glacé / Et taché ses doigts d’une encre qui n’a jamais séchée. / Son empreinte est visible quand se déchaînent les mains / Qui contiennent les mots comme sa haine entre deux points. / L’haleine des chimères taillée à même les restes du matin / Vient empester ses prières scandées comme des vulgaires refrains. / Par dégoût il s’est rasé le crâne à coup de cubes de sucre, / Le fou a ainsi embrasé les charmes des succubes qui luttent / Entre elles pour une place sur le trottoir de ses rêves / Et qui espèrent se faire traîner dans le froid de ses soirées de misère. / Pour se réchauffer il a ouvert les entrailles de ses cendriers / Et essayé de lire l’avenir dans les mégots allumés. / Par accident il a mis le feu et la maison close s’est éclairée / Sur une scène de film que la vitre propose à ses invités. Il a compris que tout ce qu’il écrit est le traité d’une revanche / Imprégnée de la salive empoisonnée des confessions illusoire / Que cette prêtresse aux seins nus a initié dans l’espoir / Que sa langue glisse et révèle la ligne courbe de ses hanches. / Les lapsus s’oupsent et roulent en semence entre ses cuisses / Tandis que la corne symbolique de Baal se hisse / Dans la structure de l’écrit primal des lettres magiques / Qui dressent les plus sauvages en golems aux crocs d’aspic. / Sa parole s’envenime quand s’anime le visage de l’alinéa / Qui cherchent à faire sortir le paragraphe de son plan plat. / Soumis à la main divine qui le tient serré entre ses doigts / L’animal triste s’affaisse dès qu’il a craché sur sa proie. / Dans le vide de ses marges se déploie l’obscène de ses traits / Qui révèlent le vrai vêtement d’où ses fantasmes s’extraient ; / Des La Senza souillées aperçues sous des robes de jour / À l’insu de l’idéal religieux qui s’est construit autour.
3.
Devant moi s’ouvre le désert, / Imprégné du silence de la route de Soi / Je m’apprête à traverser encore une fois / Le vide affectif sur un fil de fer. / En suivant les traces stériles laissées par la mer / J’espère encore trouver dans le sable / La rose en pierre qui pourra sceller mon âme. / Mais les grains glissent entre mes doigts / Et ceux qui restent collés à ma sueur s’y noient, / Ne pouvant survivre du peu de chaleur que j’octroie / Surtout la nuit quand je dors et que mon corps devient froid. / Cette petite mort est une escale / Où j’en profite pour alléger le poids de mes sandales / Et attendre en méditant / Le passage de la prochaine caravane sentimentale. / Mais dès que souffle le vent de l’est / Mon attention se disperse, / Balayée avec les restes d’Osiris / Aux cinq coins de la pyramide de verre / Qui permet de momifier le peu d’humanité qui me sert. / Chaque morceau isolé de plénitude / Qui coexiste en moi sans se rencontrer / Sont rassemblés à chaque fois par l’attraction qu’exerce / L’amante fidèle qui conserve encore en elle / Les larves de Bombyx lui permettant de tisser le ciel. / À l’abri dans les motifs opaques du tapis / Les secrets du zodiaque s’épanouissent en mythes / Qui grugent les fibres de vérité jusqu’à l’oubli. / Mais avec l’équinoxe du printemps subsiste / Un rite de survie millénaire qui consiste / À faire des poupées d’ivoire en chair / À partir de corps blanchit par l’hiver. Pour chacune d’elle je construis un sanctuaire / À même l’endroit où je les enterre. / Chaque partie de saint devient une relique / Qui facilite le maintien d’un lien psychique / Avec la force contenue dans le souvenir / Des rencontres hérétiques que j’invoque avec mes soupirs. / Sous le couvert de la prière, / J’ingère les différentes espèces d’amanites / Qui macèrent dans le jus de mes oraisons écrites. / Mais ce sont les improvisations qui précipitent / Les apparitions subites de la Vierge Noire / Que je confonds avec le délirium de l’arrêt de boire. / Seul homme sur la rive du fleuve de l’amour illusoire / Je me jette dans la mère morte / Et rapporte le début de mon histoire / À la nuit où les vagues ont cogné à ma porte. / Cette nuit-là mes rêves se sont ouverts / Et le dialogue pervers qui me parcoure l’échine / S’est levé comme un cobra royal qui hallucine / Sa morsure entre la dentelle et un tatouage tribal anonyme. / Les illusions au sujet des icônes s’animent / Et pour circonscrire le champ de l’angoisse à l’abîme / J’ai roulé en cônes les ombres féminines / Qui dansent derrière le papier de riz / Et fumé les filaments de résine / Jusqu’au bout de mes doigts jaunis. / Dans le creux sombre de leur épiderme / Les lacérations profondes sur leurs poignets / Se lisent comme des histoires de martyres modernes / Que la souffrance interne raconte. / Les larmes de sang qui s’écoulent sur les joues de porcelaines / Les rendent si belles que je découvre des veines / Là où il n’y avait que des traces de vie humaine : / Dans les draps d’une rivière asséchée / Tachés des stigmates mensuels / Où les seuls textes sacrés qui nous restent / Sont des bouts de papiers sur lesquels / Sont inscrits les numéros de nos ex.
4.
En marchant sur le bord vide de la pulsion trouée / J’ai parcouru en boucle le sentier disputé à mes visions / Alourdi par le prolongement noirci de mes vieux jours gris / J’ai fini par plier sous le poids de cette douce mélancolie / Qui me pousse à écrire pour combler à la course la distance / Qui sépare chaque percée de soleil de mes sorties de transe. / Au réveil j’ai affronté seul l’épreuve du manque / Dans laquelle s’arrachent un à un les mots de mon ventre, / Pour faire cesser les crampes j’ai bu des litres d’eau de fleur d’oranger / Qui sont devenus autant de mots d’amour en un langage codé. / Depuis dans mes tripes existent des poèmes pleins de non-dits / Construit à même la mesure du vers marqué au compte du mépris / Et qui hante la chambre anéchoïque du spectre de leur présence / Comme si la peur trace la limite du lieu où habite le silence. / Par chance l’enfant a porté une clé autour de son cou / Pour pouvoir retourner dîner seul chez lui juste au cas où. Mes monologues sans autres ont modelé ma réalité / Autour d’un pôle sur lequel ma quête s’est articulée. / J’ai passé mes soirées à attendre son téléphone / Mais tout ça pour rien, je n’attends personne, / Seulement la coque vide d’un spectre d’intentions / Où en l’espace d’une parole j’ai déduit une relation. / J’invoque à voix haute les fantômes de mon passé amoureux / Pour qu’ils me soulèvent dans les airs à hauteur de leurs yeux / Et qu’ils confondent les mots qui s’échappent de mes lèvres / Avec l’écho de leurs propres pensées qui m’obsèdent. / Je suis arrivé là où les efforts pour conjurer le sort se perdent, / Quand les déceptions sont si belles que l’action les précède. / En elles subsistent le manque qui articule mon texte / Et qui déploie la logique du vide en un vortex. / Je m’entraîne à multiplier les différents sens des mots possibles / Mais je cherche encore quelqu’un pour me servir de guide / Et sortir du cercle de craie yézid que j’ai tracé autour de moi / Sans risquer de m’écrire n’importe quoi dans le dos et sur mes bras. Marqué par la paume de mon père sur mon visage / J’essaye de quitter les haillons imposés avec l’âge. / La créance m’endette aux maillons de la chaîne / Et la souffrance s’assure sur le risque de ma haine. / Rescapé sur l’île déserte où j’ai échoué mes rites de passage / J’ai inventé un système qui me permet de remplir à plein pages / Des décharges de colère, d’insectes et de saletés / Pour que mes nuages transgressent les frontières rapiécées / Et que du ciel s’abattent les drones d’Égypte sur mes plaies / Pour guérir les aphtes comme du sel sur mon palais. / La plage a gardé intactes les traces de mes insomnies / Et je sursaute à chaque fois que je les croise en pleine nuit. / Parce que j’ai oublié d’effacer la piste sauvage de mes envies / Les matins ont retrouvé le lieu où se taisent mes récits / Distillés dans la rosée de mes rêves en un réel frelaté / Qui me rend aveugle lorsque je les bois en trop grande quantité. Chaque jour encoche l’écorce des arbres comme un supplice / Pour finir par les dénuder des liens d’autorité qui les unissent. / Reliés entre eux par un code morse calligraphié en plein et délié / Ils créent un labyrinthe de chemins usés à force de traîner les pieds. / J’ai cherché à m’affranchir du mythe du minotaure / En cousant mes lèvres chaque fois que le langage me traversait le corps. / Pour garder en moi tout cet air qu’on m’a forcé à avaler / Je me suis envolé dans les principes d’une morale insensée. / Aujourd’hui je touche terre dans les parois de mon verre de café / Pour y déceler dans ses restes les hiéroglyphes de mon passé. / En soufflant sur les fragments de sablier au creux de ma main, / J’ai déterré le temps de passage qui permet au chiromancien / De lire l’avenir dans l’écrin de l’hallucination cauchemardesque / Quand il n’y a plus rien qui puisse venir à bout de tenir cette promesse.
5.
Lutter contre le sommeil ne s'est pas avéré une solution à mes rêves récurrents, / Pour faire fuir les pigeons, des clous de six pouces sur chaque corniche en guise d'ornement, / M'ont suggéré comme cénobite prisonnier du cube de Lemarchand. / La tête lourde, je m'enfonce la nuit avec chaque respiration / Pour me réveiller le matin sur le sol de mon imagination. / En me levant je remplis mon cahier de notes des observations faites de cette fenêtre, / Sachant très bien que le matelas refermé sur moi, n'avait qu'un souhait, celui de me faire disparaître. / Pour préserver mon anonymat j'ai mis le feu aux vêtements que j'avais déjà porté / Et la seule façon qu'il reste à l'ennemi pour arriver à me reconnaître / Est la collection de piqûres d'insectes alignées sur un de mes côtés. / Pourtant j'ai l'impression qu'on me force à afficher mon identité sur un brassard / Me faisant sentir vulnérable comme si ce qui était caché pouvait désormais se faire voir. / À toutes les fois que je sors, le poids de l'histoire collective s'écrase contre ma vitre / Ce ne sont plus que des plaintes dérisoires qui traversent mes tripes. / J'ai essayé d'arrêter de me nourrir d'impressions antisémites / Mais le seul remède efficace s'est avéré un mélange d'alcool fort et d'herbes macérées / Que j'ai calé dans des mini-bouteilles en pleine rue. / Au dessus des souterrains jaunes où le coût des transports a été perdu de vue, / Je ne peux plus feindre d'ignorer l'éventualité d'un bras tendu / Qui risque de surgir hors de terre pour s'agripper à mes chevilles / Et m'entraîner dans la fosse commune qu'est la fausse humilité des vaincus. / Opprimé par l'angoisse associée aux restes d'un souvenir totalitaire / Je revendique la primauté de certains de mes plaisirs solitaires / Qui me permettent de passer de longues heures seul dans ce cimetière / Où dans chaque recoin s'entremêlent l'odeur de pisse et de bière. / Par souci de rigueur j'ai pris les corbeaux comme témoins immobiles de mes vices / Mais même eux s'indignent par leur cris de me voir vivant parmi les immondices ; / Des restes de cadavres et de squelettes qui s'accumulent et pourrissent mes relations / Prises dans des répétitions encore plus évidentes quand se confondent les prénoms. Embarqué dans un train en direction des lieux qui me hantent, / Je me sens déjà vieux devant les nombreuses soirées que j'appréhende. / Si au moment de l'énoncé je suis déjà le souvenir d'un passé éteint, / Exiler mon corps hors du champ de la parole n'aura servi à rien. / Je me revois encore une fois essoufflé dans une gare sur les quais / À essayer de trouver vainement l'endroit que le symbole a marqué / Du sceau d'un réel qui m’autorise à recommencer à boire et fumer. / Perdu dans des réflexions existentielles que j’ai de la misère à articuler, / Les arrêts aux stations m'offrent le répit de brûler ma langue au soleil / Et je sacrifie en parlant le contrôle sur ma production personnelle d'étincelles. / Sauf qu'au fil des jours dans ma bouche la pile de cendre qui s'amoncelle / Me fait cracher une fumée grise quand je tousse des restes de sommeil.
6.
Pour compenser la perte de clarté de mes journées / J’ai enroulé un foulard autour de mon visage / Pour ne laisser paraître que mes yeux élimés, / Brûlés par le reflet du soleil sur la neige sale. / L’hiver intérieur qui m’habite facilite le pistage / De la bête qui vit dans le désir de mes voyages. / En cherchant des traces fraîches de mon ethnicité, / J’ai traqué le démon pendant plusieurs semaines / Pour enfin la retrouver dans une église du Mile-End / Mise en pièce sur la scène d’un théâtre de vérité. / La pulsion sexuelle transformée en quête spirituelle / Guide le trajet de ma réponse à l’appel du minaret / Et je fraye mon chemin parmi la foule des fidèles / Qui sommeillent comme sujet des rêves que je fais. / Les prières m’ont fait tourner sur moi-même de façon obscène. Et je me révèle entre les moments où les parois de la caverne / S’ouvrent et se referment le temps d’un passage clandestin. / Comme chaque déplacement est marqué par l’effet de son retour, / J’ai été trompé par la distance entre moi et l’astre de jour. / Si j’avais su que ce permis de chasse n’était pas le mien / Je n’aurais jamais retué l’animal dont je m’étais déjà nourri. Seule ma langue décèle le sel de mes larmes / Lorsqu’elles glissent de mes joues à ma bouche. / Même les sachets de thé collés sous mes yeux / N’arrivent pas à en changer le goût de souffre. / Ma tristesse contient la saveur artificielle du sacrifice / Car on m’a convaincu de faire don de ma souffrance / À l’influence magique qu’exercent les paroles de l’exorciste. / J’ai cherché à entendre au-delà du sens, / Mais des mots arabes se sont insérés dans la prêche / Et ont recouvert le vide du discours d’une étoffe de laine rêche. / Aucune unité de mesure ne permet d’évaluer le poids de l’humilité religieuse / Ce n’est qu’en se frappant dessus qu’on s’aperçoit qu’elle sonne creuse. / Même si on a serti le contour de la foi de pierres précieuses / Les étapes de la voie ne restent que des anneaux de plombs / Chauffés à blanc par la chaleur corporelle de nos doigts / Afin de transmettre au métal froid la part honteuse de nos pulsions. / Sous la barbe et le turban, se cache l’objet brillant / Qui me pousse à joindre spontanément le chant de la prière. / Le tournoiement des derviches vient soulever la poussière / Qui s’accumule sous les meubles de mes conversations de salon / Et fait rougir mes yeux lorsqu’elle passe entre mes poumons. En marchant parmi les épouvantails dans le champ du croire / J’ai croisé le spectre d’un homme au regard presque vide / Qui se promène sans le savoir sur le sentier d’un réel / Que j’élide trop souvent de mes réflexions pour me perdre. / Par hasard, j’ai fait asseoir mon œil parmi ses couleurs / Et vu l’étrangeté du silence qui émane de ses gestes. / En enfonçant l’empreinte de ma poigne près de son cœur / Il a pris la mesure de ma force avec deux doigts de sagesse. / Un mutisme complaisant trahit une différence évidente / Et par son sourire entendu je comprends le peu qui lui reste. / Pourtant parmi ce rassemblement de soufis un seul se dresse / Et c’est lui l’homme libre à qui on a coupé la langue. / Œil pour œil, les mots sont le prix d’une vérité cartésienne / Car il n’a pas su parler ce qu’il ne pouvait vérifier par lui-même. / Soutenu au-dessus du gouffre par une parole de femme, / Ses muscles tremblent quand son corps en témoigne / Et les seuls bouts de mémoire arrachés de sa bouche / Sont des phrases articulées quand l’anche rencontre son souffle. / Au contact des différentes trames inconscientes qui se touchent / Émerge l’être d’origine que le fantasme étouffe. / Et tandis que les autres tourbillonnent emportés par la bourrasque / Lui par défaut demeure dans l’œil du cyclone et reste sur place.
7.
Je puise à même la force de mon intellect / Pour arriver à reconstituer le squelette / Inusité de mon patrimoine étrique. / Je relis attentivement les lettres / Qu’inconsciemment je me suis écrite / Je cherche avec conviction la ligne directrice / Qui m’éclairera sur la lie au fond de mes actes. / Je révise de façon maladive les textes trismégistes / Pour arriver à isoler le substrat / sur lequel se greffent les excroissances / Qui tissent la surface du drap lisse des apparences. / En suivant les signes de piste du Grand Jeu, / Ma voie se précise, délimitée par des balises claires / Qui m’amènent à retrouver foi dans ce que je veux ; / Troquer les aspérités du sous-bois / Pour le terrain plat de la clairière. / J’aimerais être mieux, / Mais quand j’accède à un autre milieu / Les cicatrices sur mes mains s’amincissent et cèdent / Les stigmates succèdent aux allergies / Dès que je m’acclimate à l’inconfort du crucifix. / Quand je prêche sur le parvis du temple / Et que je m’identifie aux idées que j’invente, / Plus rien ne m’isole de mes paroles. / Un type de psychose christique / S’implante dans la nature de mon espèce / Et infecte la psychologie du corps que par paresse / J’ai laissé choir comme mort sur le sol. / Dissocié du macchabé de mon histoire terrestre / J’inspecte les membres sclérosés que je dépèce / Et en saupoudrant les restes de talc, / Je conserve l’empreinte de mes époques. / Je calque sans crainte les rôles que j’adopte. / Car tout est consigné dans mes archives, / Des feuilles mobiles en stock de vivres. / Mais je n’ai plus la force de retourner à mes écrits / Et les esquisses précoces s’accumulent dans l’oubli / Comme autant d’ancêtres anthropoïdes / Qui ont luttés dans le vide pour leur survie. / À ce stade-ci, j’ai les deux mains dans le compost / Et je m’évertue à ressusciter le Faust de mes récits, / Celui qui a fait monter le diable et le magicien dans le même char / Avec comme but de réaliser l’or du millième matin. / Mais il y a encore des fragments de miroir / Sur le plancher de la salle de bain / Et quand je marche pieds nu sur la céramique blanche et noire / La couleur du sang me resitue à un niveau plus humain. Ouverture sur le monde / Et sur ses contes grotesques / Quand les mythes s’envolent, / Seul le linge sale reste. Pour retrouver la noirceur nourricière de mon isoloir, / J’ai débranché à contrecœur l’ordinateur / Qui me détournait de l’activité vive de ma mémoire. / Occupé par des jeux solitaires compensatoires, / J’ai pallié à l’amour que j’étais incapable de recevoir. / Maintenant que la peur d’être seul est plus que présente / Je retrouve l’odeur familière de l’encens / Et le besoin de boire un thé à la menthe. / Les derniers mois ont remis à vif mes contradictions latentes / J’ai donc racheté le bouddha décoratif que j’avais mis en vente. / En renversant à nouveau le contenu de ma tasse / J’ai pu observer par où passe l’ennui qui nourrit mes manques ; / Irriguées de désirs, mes envies prolifèrent / Du côté où mes dépendances se transfèrent. / Par sécurité je garde en vie des peurs non-fondées, / Hanté par l’odeur des restes humides de l’incendie / J’associe des agrégats d’émotions solides à ce que j’écris. / La crainte m’oblige à garder l’équilibre / Car dans mes crises de vertiges je suis attiré par le vide / Et la chute qui vient avec si je me décide. / Par moment je parviens à lâcher prise / Et évite d’affronter mes souffrances de façon impulsive, / Si je lévite je me ramène vers le bas / Où j’oppose ma situation actuelle à mes aspirations réelles / Afin de définir les résultats circonstanciels. / Je me revois dans les décombres d’un sous-sol de banlieue / Qui s’est écroulé avec la perte des symboles qui me reliaient aux dieux. / Dans cette pénombre on peut encore entendre des airs de rock progressif / Rythmés par la quinte de toux d’un groupe d’adolescents dépressifs / Qui s’étouffent en négociant entre les tentatives et les suicides, / Élargissant leurs perspectives avec chaque trip d’acide. / Cependant, l’arrière-goût du buvard est devenu insipide / Et le fond de mon regard de moins en moins accessible. / Je ferme mes paupières pour contenir la prière / Qui accompagne chaque souvenir que j’incinère. / Au centre de mon être trône une urne funéraire / Pleine des cendres de la peine associée aux amis que je perds. / La flamme sous mon creuset voudrait voir le jour au sommet de mon crâne, / Fondre les différents aspects de ma personnalité pour enfin en faire une âme.
8.
9.

about

Music critic Byron Coley characterized, in Wire Magazine, the last two Héliodrome releases as ”Psych-spattered neo-dreamy avant-rock” and “Freaked variant on the european Rock in Opposition tradition”. The best attempt yet to describe the music of this Montreal experimental rap outfit.

If Héliodrome’s first full length “La lumière ordinaire du jour” plundered wholeheartedly in obscure free-jazz references, subsequent releases pushed the envelope further to include more live instruments. To compose “Le Jardin des Espèces”, the duo of Khyro (rap, electronics) and ypl (guitars, synths), were joined by drummer Samuel Bobony (Black Givre, Avec le soleil sortant de sa bouche), Pierre-Guilhem Roudet on trombone and Eric Gingras (Enfant Magique, Avec le soleil sortant de sa bouche) on bass and synths.

This led to the recording of live improvisation sessions in the summer of 2014, later reworked and rearranged by Scott Da Ros (Endemik Music). Blending rap, free-jazz and experimental rock, this mixture hints towards a specific musical era, close to the French record label Futura (Red Noise, Fille Qui Mousse, Barricade). Needless to say that “Le Jardin des Espèces” is a strange record, willingly embracing the Rock in Opposition aesthetic.

With this new record, Héliodrome pushes further towards it’s own musical genre, that could be qualified as Rap in Opposition.

Français

Le critique musical Byron Coley a qualifié dans les pages du magazine Wire les deux derniers projets d’Héliodrome de : « Psych-spattered neo-dreamy avant-rock » et de « Freaked variant on the european Rock In Opposition tradition ». La tentative la plus juste à ce jour pour définir la musique du groupe de rap expérimental montréalais.

Alors que le premier album « La lumière ordinaire du jour » puisait allègrement dans un répertoire free-jazz, les sorties subséquentes ont poussé l’enveloppe plus loin en incluant plus d’instrumentations originales. Pour « Le Jardin des Espèces », le duo de Khyro (voix, électroniques) et ypl (guitares, synthétiseurs) a été rejoint par Samuel Bobony à la batterie (Black Givre, Avec le soleil sortant de sa bouche), Pierre-Guilhem Roudet au trombone et Éric Gingras (Enfant Magique, Avec le Soleil sortant de sa bouche) aux synthétiseurs et basse électrique

Fruit d’une séance d’improvisation enregistrée à l’été 2014, remanié et trituré par Scott Da Ros (Endemik Records), « Le Jardin des Espèces » est une œuvre étrange, qui embrasse avec aplomb l’esthétique dite Rock In Opposition. En mélangeant le rap, le free-jazz et le rock expérimental, des rapprochements peuvent être faits avec une époque musicale particulière, marquée entres autres par des sorties du label français Futura (Red Noise, Fille Qui Mousse, Barricade…).

Avec ce nouvel album, Héliodrome poursuit un parcours artistique idiosyncratique et continue de forger sa propre niche musicale, qu’on pourrait qualifier de Rap In Opposition.

credits

released March 14, 2017

Music by Héliodrome: YPL (synths, guitars, bowed banjo, harmonium), Eric Gingras (bass, guimbarde, harmonium, synths, handclaps), Pierre-Guilhem Roudet (trombone), Samuel Bobony (drums), Scott Da Ros (post-production, samples, handclaps)

Additional Musicians:
Clarinet on A3 by Félix de L’Étoile
Vocals & Words on B3 by James P Honey

Recorded by Félix de L’Étoile at La coop coup D’Griffe
Trombone recorded by Samuel Bobony at Sentinelle en Silence
All vocals (except B3) recorded by Scott Da Ros at Spaacemoon, Snoowcaat
Arrangements and mixing by Scott Da Ros at Spaacemoon, Snoowcaat
Mastered by J. LaPointe at Archive Mastering

Artwork by LMTL 75
Additional artwork by Pierre-Guilhem Roudet
Screen printed by Aura at La coop coup D’Griffe

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Endemik Music Montréal, Québec

Canadian independent hip hop and experimental label since 2001. Originated in Halifax, NS and re-located to Montreal, QC.

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